Toutes les options du beau gosse : 5 questions à Myriam Gallot
L'autrice nous en dévoile un peu plus sur son dernier roman Toutes les options du beau gosse.
• Présentez-nous vos deux personnages principaux, si dissemblables... Que s'apportent-ils l'un l'autre ?
Jusqu'à présent, je n'avais publié que des romans pour un lectorat plus jeune, j''ai voulu me mettre dans la tête d'un collègien - un garçon, en plus ! - pour explorer cette période de la vie où se téléscopent tant de questions essentielles. Lucas, le narrateur, est réfléchi, assez discret au collège, fils unique d'enseignants. Florian, lui, vit dans une fratrie de quatre enfants. Son père est allemand, avec une conception plutôt permissive de l'éducation. Sa mère est absorbée par son travail et peu présente. Il jouit donc de plus de liberté et est plus fantaisiste, voire "foufou", comme peuvent l'être certains ados de 13-14ans. Il est populaire au collège et ferait tout pour le rester.
Ils ne sont pas immédiatement amis. Au début, Lucas est surtout un public pour Florian et ses piteries. Puis leur relation évolue. Lucas permet à Florian de prendre du recul sur lui-même. Même si Florian fait semblant de ne pas l'écouter, il prend finalement en compte ce qu'il lui dit. Après une période de rupture, il réalise que Lucas lui a manqué. Tous deux mûrissent en apprenant l'un de l'autre. La futilité et la sensualité pour Lucas. Le respect d'autrui et l'écoute de ses sentiments pour Florian.
• Florian envisage les filles comme des objets de consommation. Et certaines filles du roman sont attirées par son côté "bad boy". Pourquoi est-il si difficile de se débarasser de ces clichés ?
Ces images des hommes et des femmes paraissent éculées. Pourtant, elles viennent de loin et persistent. Dans mon roman, elles prennent la forme d'une vedette coréenne de la chanson, d'un film porno, d'une émission de speed-dating agricole... Les stéréotypes de genre se présentent comme des évidences difficiles à remettre en question. Ils sont ainsi des prisons dont il est compliqué de sortir, pour les filles comme pour les garçons, notamment à l'adolescence. Ils produisent de la souffrance.
Heureusement, les femmes et les hommes sont différents des clichés dans la vraie vie, beaucoup plus variés et peuvent constituer des contre-modèles, même quand ils sont en apparence rejetés par les ados. Florian dit ne pas avoir envie de ressembler à son père, qu'il ne trouve pas assez viril, et, en même temps, il est fier de ses talents de cuisinier.
• Que ressent Lucas après avoir visionné une vidéo porno que lui montre Florian, au début du roman, sans y être prêt ?
Lucas est perturbé dans son rapport aux autres, en particulier aux filles, après avoir vu le porno. Il fait du judo, n'arrive plus à toucher les corps féminins, au point d'arrêter une activité qu'il pratiquait depuis des années. Il sait à la fois qu'il est trop jeune pour regarder légalement des pornos et qu'à son âge, beaucoup en ont déjà vu. Il cherche ainsi à garder la face devant Florian en cachant son malaise... plutôt maladroite, d'ailleurs. Florian se fait un malin plaisir à jouer de son embarras.
• Les filles de votre histoires ont les mots pour se défendre et penser ce qui leur arrive. Cassandra convainc Lucas de se mettre de leur côté en lui disant : "Nous aider, c'est aller dans le sens de l'Histoire." Finalement, c'est quoi, être un "beau gosse", aujourd'hui ?
Les filles ont entendu parler de #MeToo. Elles sont la génération d'après, conscientes des abus de pouvoir commis par les hommes à l'encontre des femmes et décidées à ne pas se laisser faire. Cassandra, surtout, est une féministe revendiquée et entraîne les autres dans son sillage. Quand l'une d'entre elles est victime de Florian, non seulement les filles ne se taisent pas, mais elles vont plus loin : elles agissent collectivement.
Il n'existe pas une façon unique d'être un "beau gosse". Lucas, comme Florian, cherchent la leur. Tous deux entrevoient que pour séduire, il faut respecter l'intégrité de l'autre mais aussi oser y aller. Un équilibre pas évident à trouver. Florian, pour se rapprocher de Cassandra, devra réussir à s'excuser auprès d'une fille dont il réalise qu'il l'a atteinte dans son intimité sans même y penser. Quand à passer à l'action, ce n'est pas évident pour Lucas...
• Que diriez-vous à un lecteur, à une lectrice, pour lui donner envie de lire votre roman ?
Tu vas rire ! L'histoire est écrite simplement, pleine d'humour. Même si tu n'as pas l'habitude de lire, tu pourras l'apprécier. J'ai eu envie d'y mettre de la légèreté. Peut-être parce qu'on était confinés et que j'avais besoin de rigoler dans une période qui n'était pas très drôle ?
J'ai beaucoup utilisé le langage oral, en particulier celui des ados que je trouve inventif et savoureux. Je laisse souvent traîner mes oreilles, quand j'entends des jeunes parler... et j'en ai nourri mon roman !
L'autrice
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